L’identité et la migration dans la mémoire collective

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Pour ceux qui ont fait le choix de se défaire des auspices de la famille, les déserteurs ou les  « immigrés » « migrants » «  les réfugiés » comme on les appelle de nos jours,  que leur choix soit l’éloge d’une fugue justifiée, ou qu’ils ont quitté l’assurance du familier par manque d’assurance ou peu importe, du moment qu’ils sont partis de leurs pays, ils se sont soumis à l’épreuve du renouveau et sont allés chercher une deuxième naissance pour s’abandonner à l’ailleurs. Mais comment se défaire de sa famille ? De son origine ?  De sa ville natale ?  De tous ces fragments de lieux de sens d’odeurs et de bruits qui ont construit sa mémoire et son être? Ces choses qu’on peut occulter préserver fuir ou en faire l’autel de son parcours. Ces éléments usuels pour ceux qui sont restés sont fondamentaux pour ceux qui sont partis,  ce qu’on appelle l’origine ou dans un terme plus en vogue l’identité.

Eugene Delacroix, La liberté guidant le peuple

L’origine n’est pas qu’un lieu auquel on appartient de droit ou de fait, l’origine ne se mesure pas en Kilomètres ni même en attachement, c’est la molécule première qui définit la forme et le fond de ce que nous serons. On part se réfugier, étudier, travailler ou découvrir des nouveaux mondes et des nouvelles cultures peu importe la destination et les aventures qu’il engendrera, c’est le devient et d’où l’on vient qui est toujours déterminant de notre illusion du bonheur.

L’importance du voyage ne se contente pas de ce qu’on gagne mais ce qu’on devient, à un certain moment de ce voyage on va commencer à réfléchir à ce que nous sommes devenus et la question de l’identité et de l’appartenance font surface et l’emporte.

Cette quête de l’identité dans un soi déterminé réfléchi et aventurier, vit son pays sa famille et ses origines par procuration, et développe un besoin de revenir à la communauté même si sa quête initiale était de la quitter, et « revenir » n’est plus une fatalité ou un échec insurmontable mais un acte primitif.

Eugene Delacroix, La liberté guidant le peuple

Pourtant l’histoire de l’humanité est fondée sur la mobilité des humains, les civilisations témoignent de la richesse de ces mouvements de peuples qui ont contribué aux édifices et à la vie économique. Traiter de l’immigration de nos jours est surtout focalisé sur les quotas de l’immigration, les personnes immigrent pour échapper à la guerre, à la dictature et la misère, ce qui n’est pas seulement légitime mais primitif. Comment donc fermer les frontières et laisser mourir en mer des êtres humains qui essaient de survivre ? Quelles alternatives si on continue à franchir les souverainetés des pays, vendre des armes et déclencher des guerres dans le monde ? La survie l’emportera toujours, aujourd’hui pendant que les plus grandes puissances, les ONG et leurs partenaires déploient des moyens et des sommes faramineuses pour lutter contre l’immigration clandestine, dans les pays en développement l’immigration clandestine s’organise en famille, on connaît de noms et d’adresses les passeurs, on connaît les bateaux de fortunes, ce sont des réseaux aussi puissants que les grandes mafias de ce monde, mais on n’osent pas les interpeller, ni à arrêter leurs activités, ni à déjouer les voyages clandestins de plus en plus nombreux et mortels.

Eugene Delacroix, La liberté guidant le peuple

Le voyage même clandestin est devenue dans les esprits des uns une légitimité, les gouvernements des pays en développement impuissants et dépassés par une population jeune qui ne cessent de faire augmenter le taux de chômages, et aussi la rébellion et les soulèvements, agissent peu face à la migration, les médias ne traitent de ce sujet que d’un angle faits divers quand il y a des bateaux qui échouent, peu de campagnes de sensibilisation au danger sont mis en place, et quand on vit dans des pays en développement où on n’a pas de quoi se nourrir et on a accès aux programmes de télévisons, aux comptes Instagram et aux profils Facebook de la jeunesse dorée européenne qui se met aux régimes alimentaires à cause de la surconsommation alimentaire, on ressent l’injustice, le déséquilibre, les jeunes ne se soucient plus des dangers, ils veulent tous vivre aisément comme sur les images des « instagrammeurs », même si le prix à payer est la vie . Les paramètres de la capacité d’accueil sont complètement méconnus ou du moins occultés dans l’esprit de ceux qui sont en quête de survie, ou de consommation tant vénéré et mise en avant, les immigrés découvrent une amère réalité souvent quand ils arrivent dans les pays développés, et la frustration de l’échec crée plusieurs maux psychologiques chez les uns et dégrade l’image que l’autre a de l’immigration et des « immigrés ».

L’homme se déplaçait et voyageait pour chasser sa nourriture il ne souciait pas des frontières, il affrontait aussi les dangers et il s’adaptait à son lieu de vie, et au fil des siècles l’homme a crée des frontières pour qu’elles deviennent son plus grand danger. A notre ère la seule façon de remédier à ce désastre de voyages dangereux et clandestins et à la saturation des flux migratoires n’est certainement pas de fermer les frontières mais d’ouvrir les opportunités.

4 réponses
  1. Sadika KESKES
    Sadika KESKES dit :

    Une analyse pertinente et des phrases clefs sur l’identité, une ouverture des esprits de lumières: « l’origine ne se mesure pas en Kilomètres ni même en attachement, c’est la molécule première qui définit la forme et le fond de ce que nous serons.  »
    j’adore aussi cette phrase presque de l’humour qui cache derrière la personnalité de l’auteur : »Hors les « immigrés » au sens littéral du mot, n’ont pas prévu une boussole,  »
    et la conclusion touche directement à l’essentiel, si on met en avant ce que porte les hommes de positifs en eux à savoir essentiellement leur culture, le problème est déjà résolu à moitié.
    « nous avons marginalisé leur besoin d’appartenance et nous avons ôté leur accès à leur culture »

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    • Refka-Payssan1
      Refka-Payssan1 dit :

      Inspirante Sadika Keskes merci pour ce mot et cette lecture épatante . Je marche sur vos pas et merci pour la belle et inspirante performance des tombeaux .
      Mes amitiés .

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    • Boussetta
      Boussetta dit :

      Je suis interloquée d’émotion face à une plume et une thématique dont j’ignore les tenants et aboutissants. Mes yeux sont ttes de bleu de la Méditerranée remplis, je me suis vue tanguer puis amarrer, la terre ferme et si solide et rugueuse. Les pays se voient consolider des frontières qui n’ont existé que selon le bon vouloir chimérique de la matière et la suprématie de l’homme sur l’homme. Ce voyage me fut nécessaire. Merci. Écris

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      • Refka-Payssan1
        Refka-Payssan1 dit :

        Nous somme tous des voyageurs dans ce monde chère Nadia, peu importe la destination c’est le voyage qui compte, vous avez passé une bonne navigation dans ce lieu et laissé une belle empreinte, j’en suis ravie .

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